1.8 Bandes dessinées époque victorienne

 

 

 


 

Titre : Jack l’Éventreur, Tome 1 - Les liens de sang


Scénariste : François Debois
Dessinateur : Poupard
Edition :  Soleil (2012)


Résumé :

Londres 1888.
Le Mal s’abat sur la capitale européenne, un monstre sanguinaire tue et dépèce des prostitués dans les bas-fonds de Whitechapel, on le surnomme Jack l’Éventreur.

 

À Scotland Yard, l’inspecteur Frederick Abberline et son équipe mènent l’enquête.

 

Entre lettres anonymes, dénonciations calomnieuses, milices qui font la loi et le peu d’indices qu’il recueille au fil de ses virées nocturnes, le commissaire s’égare…


D’autant qu’il est secoué par les démons de son passé trouble. George Godley, son assistant, s’interroge sur son supérieur. D’inquiétantes coïncidences l’amènent à penser qu’Abberline est lié à tous ces meurtres…


Tous les deux sont-ils prêts à découvrir l’insoutenable vérité ?

 

"Londres, 1888. L'été touchait à sa fin, et les premières feuilles recouvraient déjà le sol d'un tapis ocre.

 

Peu à peu, je voyais à ma porte le changement de ce siècle à venir, animé par un appétit vorace et cruel. n'attendant que le moment propice pour nous engloutir.

 

Mais jamais je n'aurais imaginé que cette nouvelle ère eût un jour enfanté un homme à son image, capable des pires atrocités...

 

Je dois me hâter maintenant, car la vérité sur cette histoire, c'est dans la mort que je vais l'emporter..."

 

Critique :

Cette critique, je vais la découper en plusieurs morceaux... C'est plus simple.

 

Bon, tout le monde connaît l'histoire de Jack l'Eventreur...

 

Je veux bien entendu parler des grandes lignes. Pas besoin de savoir me préciser si les intestins de Catherine Eddowes avaient été posés sur l'épaule gauche ou droite... ou si l'ablation du rein concernait celui de gauche ou de droite (posé sur épaule droite, ablation rein gauche, pour votre culture générale et pour pouvoir le ressortir lors d'un dîner de famille).

 

Pour ceux qui ont besoin que je leur rafraichissent les souvenirs, je vous dirai qu'en 1888,  les bas quartiers de Whitechapel, à Londres, sont en proie à un tueur en série qui tue et mutile de manière atroce ses victimes, toutes des prostituées.

 

La police ne trouve pas de piste mais est très intriguée par le mode opératoire du tueur ; bien qu'on ait affaire à de véritables boucheries, tout est fait de manière très méticuleuse, comme si le tueur avait de très bonnes connaissances chirurgicales, comme s'il était médecin...

 

A notre tueur qui éventre et éparpille, on lui ampute, heu, pardon, on lui impute cinq victimes et on en suppute quatre autres, mais sans que les faits soient avérés.

 

J'entends déjà certains soupirs ou des commentaires grinçants puisque cette histoire de Jack l'éventreur, on l'a déjà vue, entendue, lue, mainte et mainte fois.

 

Que dire de plus si ce n'est que l'on ne saura jamais son identité réelle ?

 

Que pouvaient bien faire ces deux auteurs de plus que les autres, ou de différent, sur ce sujet ?

 

Tranchons dans le vif et mettons les choses à nu : Debois et Poupard tirent superbement bien leur couteau... heu, leur épingle du jeu !

 

Pour une prise de contact, ils dévoilent leurs charmes tout en nous cachant encore les trésors de leur caverne d'Ali Baba. Dévoiler, appâter, intriguer, mais pas tout montrer.

 

L'effeuillage se fait en douceur, nous met l'eau à la bouche, mais ils en gardent sous le coude pour le tome 2.

 

En ce qui concernent leurs atours, je dois vous avouer que les dessins sont d'une grande beauté, très réalistes.

 

Les pages de l'album jouant la danse des sept voiles avec des fonds blancs et de temps en temps, avec une alternance de fonds de pages noires. Magnifique !

 

Quant aux décors, ils sont d'époque et parfaitement maîtrisés. Nous sommes dans le Londres de 1888, avec sa misère et ses cheminées qui crachent de la fumée noire. La misère suinte du quartier de Whitechapel.

 

Je précise aussi que l'intrigue repose sur un contexte politique et social difficile. Non, ça ne rigole pas dans le quartier et on réprime les révoltes à l'aide de bains de sang. Les auteurs ont potassé leur Histoire et nous la servent dans ce banquet. Un délice, sauf pour les délégués syndicaux qui risquent d'en avaler leur drapeau de travers.

 

Très loin des adaptations fantastiques que j'ai déjà pu voir ou lire, le scénario se rapproche nettement plus de la réalité historique et donc privilégie l'enquête de l'inspecteur Abberline et sa vie personnelle.

 

Pour ceux et celles qui ont vu le film "From Hell" avec Johnny Deep, vous trouverez des ressemblances entre le personnage de la bédé et celui du film. Ils sont tourmentés au-delà du possible.

 

Ici, Abberline est en quelque sorte un frein à sa propre enquête : c'est un personnage très compliqué dont le passé très trouble ne quitte pas... Il a un côté obscur, vraiment très obscur. Cela le rend plus humain.

 

Les auteurs nous proposent donc une autre "version" des meurtres de 188, tout en restant assez proche de celle qui est la plus couramment admise. Ils ont ajouté un élément qui ne fut pas pour me déplaire.

 

De toute façon, tout est possible dans l'identité de Jack... Hormis les absents de cette époque.

 

Que ce soit au niveau des dessins, des décors, du scénario, du suspense, des personnages, les auteurs nous régalent.

 

Vivement le second et dernier tome !

 

Challenge "Thrillers et polars" de Liliba.

 

 

 

Titre : Jack l'éventreur, Tome 2 : Le Protocole Hypnos

Scénariste : François Debois
Dessinateur : Poupard
Édition : Soleil (2013) 

Résumé :

Printemps 1889. Plusieurs mois ont passé depuis les événements qui ont ensanglanté Whitechapel et la vie a repris son cours pour tous les miséreux qui y résident.

 

L'inspecteur Frederick Abberline fait la chasse aux souteneurs, qui ont fait mettre les bouchées doubles à leurs filles pour combler le manque-à-gagner imposé par Jack. Mais son obsession de justice le pousse à des méthodes peu conventionnelles pour Scotland Yard, et son fidèle compagnon George Godley le met en garde. Il est peut-être temps qu'il prenne le large.

 

Une série de meurtres similaires dans leur mode opératoire à ceux de Jack a été commise à Paris. Tandis qu'Abberline traverse la manche pour débusquer le tueur, Godley est sollicité pour une nouvelle affaire : un docteur retrouvé éventré dans une pièce fermée de l'intérieur. Seul indice : un manuscrit en arcado-cypriote qui contient des révélations troublantes.

 

Deux enquêtes, deux tueurs. Tout est lié, le protocole Hypnos est la clé et Abberline va devoir affronter l'insoutenable vérité...

 

Critique :

♫Le soleil vient de se coucher, Encore une belle nuitée, ♫ Il va bientôt arriver... l'ami des prostituées, ♪ Il vient toujours au bon moment, ♪Avec son scalpel qu'il te fou dedans, ♫ L'ami des prostituées, L'ami qui les a éventrées ♪ Il choisit toujours la bonne heure, celle où il n'y a pas de lueur, l'ami du sang qui va gicler, l'ami qui les a tuées ♪

 

Si en lisant ces lignes vous aviez la chanson de "L'ami Ricoré", et bien, c'est pas faux parce que je me suis basée la-dessus pour mon intro. Me demandez pas d'où ça vient, c'est mon esprit un peu barge qui me souffle des idées.

 

Bref, nous avions commencé le tome précédent avec l'inspecteur Abberline cloîtré dans le trou du cul du monde, en train de rédiger son journal, nous expliquant son enquête sur l'Eventreur, ses tourments personnels (Abberline) et je me demandais de quel horrible secret il était le dépositaire pour écrire aussi fébrilement.

 

Là, les révélations allaient arriver et j'avoue que je ne m'attendais pas à ça du tout. A bas les vieilles théories remâchées par tous et place à la nouveauté.

 

Un truc de dingue, une enquête de fou, des meurtres au Nevada (oui, aux Etats-Unis) et à Paris qui ressemblent à s'y méprendre à ceux de Jack (qui pourtant a terminé son job à Whitechapel - sa petite entreprise s'exporterait bien et ne connaitrait pas la crise, on dirait) et la population du quartier de Whitechapel qui gronde parce non, rien ne va chez elle.

 

Les souteneurs ont demandé à leur paripépati... à leurs putes de mettre les bouchés doubles (si je puis me permettre l'expression) pour récupérer le fric perdu durant le règne de Jack... Mais bon, c'est comme en commerce, on ne peut pas doubler le nombre de clients du jour au lendemain !

 

L'inspecteur Abberline n'est pas au bout de ses surprises, le lecteur non plus, sauf s'il a eu le malheur de lire le 4ème de couverture un peu trop volubile à mon goût puisqu'il déflore une partie du mystère.

 

Qui a tué ? On murmure que le commissaire Derrick ne serait pas étranger à l'affaire... Hé, vous ne pensez pas que j'allais vous le dire, non ?

 

Les dessins rendent bien l'atmosphère lourde du quartier de Whitechapel, ils vous montreront l'avenue des Champs Elysées sans voitures, mais avec des cab et des fiacres et la tour Eiffel en construction en prévision de l'exposition universelle de Paris où on exposait même des indigènes en provenance directe des colonies françaises.

 

Un bon scénario, innatendu, coup de pied au cul, même. Deux tomes et l'affaire est réglée, sans trainer en longueur.

 

Le final ? C'est retors, c'est salaud, c'est bien amené, du suspense, des questions, des sueurs froides, les auteurs nous ont mené par le bout du nez et on les a suivi avec plaisir jusqu'à ce dénouement final où on a envie de crier "hé, j'en veux encore un autre, moi".


Lu dans le cadre des Challenges "Thrillers et polars" de Liliba,  "Polar Historique" de Samlor,  "I Love London" de Maggie et Titine, "Le mois anglais" chez Titine. et le challenge "Victorien" chez Arieste.

 


 

Titre : Van Helsing contre Jack l’Éventreur, Tome 1 – Tu as vu le Diable


Scénariste : Jacques Lamontagne
Dessinateur : Radovic


Édition: Soleil (2012)


Résumé :

Deux ans se sont écoulés depuis le jour où Van Helsing enfonça un pieu de chêne dans le coeur de Dracula, mettant ainsi un terme à son règne infernal.

 

Cependant, l’homme n’en est pas sorti indemne. Maintenant installé à Londres, Van Helsing est depuis plongé dans une profonde dépression.

 

Désespéré de voir ainsi son ami prostré dans ses appartements, Abberline, inspecteur à Scotland Yard, lui propose de l’accompagner afin de mener enquête sur une série de meurtres perpétrés dans l’East End par un dément que la presse a surnommé “Jack l’Éventreur”.

 

Van Helsing finira par accepter. Débutera alors une nouvelle chasse contre le Mal…

 

Critique :

Puisque le Tome 2 était enfin sorti, je me suis replongée dans le premier tome afin de me remettre toute l'histoire en tête. 3 ans, quasi jour pour jour, ça fait long pour ma mémoire.

 

"Van Helsing contre Jack l'Éventreur" commence plutôt par Van Helsing contre Christopher Lee/Béla Lugosi... Pardon, contre Dracula, dans les Carpates, en Transylvanie.

 

Et notre Abraham Van Helsing nous réussit un magnifique planté du bâton dans le cœur du vampire le plus célèbre, n'en déplaise aux fans de "Twoilette".

 

L'élimination du comte Dracula, en prologue, est là pour nous expliquer pourquoi c'est un Van Helsing perturbé, en proie à des cauchemars terribles et à une langueur dépressive que l'inspecteur Abberline trouve. Abraham croyait que l'air de Londres chasserait ses souvenirs, et bien, c'est raté.

 

— Je ne sais si cette blessure guérira jamais. Au contraire, elle semble se gangrener, s'étendre et m'envahir comme le plus insidieux des venins.

— Le temps soigne soigne les blessures... même les plus profondes. Soyez patient.

— Ce jour-là, dans les Carpates, j'ai regardé le Mal dans les yeux. Un regard si froid, si noir, dénué de sentiment humain... Un gouffre dans lequel mon âme s'est perdue.

 

J'ai trouvé l'inspecteur Abberline est moins bien dessiné que dans le tome suivant (on change de dessinateur). Alors que Van Helsing est réaliste et bien esquissé dans les moindres détails, Abberline fait "inachevé" ou bâclé.

 

Si l'inspecteur est allé rendre visite à Van Helsing, c'est pour lui parler des prostituées qui se font fait trancher la gorge et même plus, car affinités.

 

L'enquête piétine à la Division H et le commissaire Warren leur mène la vie dure. Devant le peu d'indices, Abberline aimerait qu'un esprit aussi brillant que celui d'Abraham vienne éclairer leur enquête.

 

Pour le moment, les mortes sont Martha Tabram (non canonique des crimes de Jack), le 7 août, Mary Ann Nichols, le 31 août et Annie Chapman, ce 9 septembre.

 

L'être tourmenté, ici, c'est Van Helsing, en proie à des cauchemars, dont certains ont l'air d'être prémonitoires.

 

Van Helsing consomme de la morphine comme moi du café, est plus déprimé qu'un gros actionnaire de la banque Fortis après sa chute en 2008, sans parler de son comportement pour le moins ambigu.

 

Privé de morphine, mes nuits sont ponctuées par d'horribles cauchemars et d'interminables moment de veille. Il est ironique de constater que le seul remède qui puisse soigner ces maux soit le poison qui les a générés.

 

Si l'enquête est presque holmésienne, à la différence que ce n'est pas Sherlock (par contre, j'ai aperçu un journaliste affublé du deerstalker), il n'y a pas de nouveauté en ce qui concerne la traque de notre serial-killer.

 

Tout l'intérêt de l'histoire résidant dans le comportement de Van Helsing et dans cette ambiguïté qu'il y a autour de son personnage et de ses rêves prémonitoires.

 

Au niveau du dessin, il est classique mais soigné, nous offrant des personnages bien caractérisés, sans oublier les décors de la ville de Londres (1888) qui sont très soignés.

 

Les bas-fonds sont travaillés et voir les mats du port, sur fond de ciel plombé, ajoute une ambiance sombre. Même les pensées des personnages nous donne un aperçu du temps lourd qu'il régnait ce jour du 9 septembre 1888, dans l'East End.

 

L'air est particulièrement étouffant, aujourd'hui. Avec toutes ces cheminées qui crachent leurs nuages de suie, pas étonnant qu'il soit si difficile d'y respirer.

 

Si vous voulez en apprendre un peu plus sur la vie qu'il régnait dans ces quartiers miséreux, la bédé vous fera un joli petit étalage des injustices dont était victime les gens de ce quartier. L'absence d'une morgue n'étant qu'une partie visible de l'iceberg. C'est bien connu, les morts ne votent pas et ne paient pas d'impôts.

 

— Depuis qu'on a démoli l'ancienne morgue afin de faire place à une route, les autorités n'ont pas jugé bon de construire de nouvelles installations. On a donc converti un local désaffecté à cette fin.
— Diable ! Si un quartier a pourtant besoin de tels équipements, c'est bien l'East End.
— Les morts ne votent pas et ne paient pas d'impôts, Abraham.

 

Grand réalisme aussi dans la description des cadavres, des faits, des témoins, des abérations qui eurent lieu, telles laver les corps et les scènes de crime... Ayant lu des tas d'ouvrages sur Jack, ces passages me font l'effet d'une redite.

 

Tiens, en voyant la cour dans laquelle on a trouvé le corps d'Annie Chapman, j'ai repensé au film "From Hell" et l'image de la bédé était tip-top comme celle du film, le beau Johnny Deep en moins.

 

Pour un néophyte, il y a moyen d'en apprendre sans pour autant se taper la lecture de gros romans afin de briller lors d'un repas de famille au moment de la découpe du poulet ou de la dinde.

 

Le choix des couleurs nous donne une ambiance à la fois chaude et sordide.

 

Les dialogues aussi nous donnent une bonne indication sur ce que les gens pensaient de ceux qui vivaient dans l'East End, j'en veux pour preuve une phrase d'un policier de la City, le chef Smith (le 4ème meurtre, celui de Mittre Square, était dans le City).

 

— Abberline, que ce type d'homicide frappe le quartier de Whitechapel est une chose, mais que le meurtrier oeuvre maintenant sur notre territoire est totalement inadmissible. Il est impératif que la Division H contienne la crasse et les histoires sordides de l'East End à l'intérieur de ses limites.

— Que ce soit dans l'East End ou dans la City, le sang qui coule entre les pavés à la même couleur, chef Smith.

 

Petite réclamation : j'ai trouvé que les habits d'Elizabeth Stride étaient un peu trop propres et correct pour une fille de l'East End.

 

Le fait de le relire a remis tout les petites détails du second tome en place et j'ai trouvé que la suite était cohérente, travaillée.

 

L'auteur a fait en sorte que le diable se cache dans chacun des détails tout comme il a fait preuve de minutie dans les faits canonique des meurtres de 1888 (pour Tabram, c'est un point de discussion entre ripperologues) tout en changeant quelques petits points (Van Helsing) pour, sans doute, arriver à une conclusion qui n'est pas inscrite dans la réalité.

 

Une belle découverte.

 

Challenge "Thrillers et polars" de Sharon (2015-2016),  Challenge "Polar Historique" de Sharon, Challenge "Victorien" chez Arieste, Challenge "XIXème siècle" chez Netherfield Park et "A year in England" chez Titine.

 

 

 

 

Titre : Van Helsing contre Jack l’Éventreur, Tome 2 - La Belle de Crécy


Scénariste : Jacques Lamontagne
Dessinateur : Bill Reinhold


Édition : Soleil (2015)

Résumé :

Le plus célèbre des chasseurs à la poursuite du plus sanguinaire des tueurs dans les sombres rues londoniennes du XIXe siècle ?

 

Jack l'Éventreur court toujours, aussi insaisissable que les brumes qui enveloppent les rues de Whitechapel.

 

Tandis que l'inspecteur Abberline subit les foudres de ses supérieurs, Van Helsing est sur les talons du tueur.

 

Mais est-il vraiment le chasseur ou ne serait-il pas plutôt le gibier ? Gibier bien fragile d'ailleurs, car son addiction à la morphine paralyse sa légendaire vivacité d'esprit.

 

Voyant un fait nouveau relancer l'enquête, Van Helsing redouble d'ardeur afin de démasquer l'assassin.

 

Mais les chemins vers la vérité risquent d'être aussi tortueux que l'esprit malade du célèbre rabatteur de vampires.

 

Critique : 

Trois ans que j'ai attendu la suite de cette bédé ! L'attente fut longue mais le résultat fut à la hauteur de mes attentes.

 

Comparé à une autre bande dessinée que je viens de lire (Sherlock Society), les couleurs de cet album sont plus chaudes, le trait plus prononcé.

 

Nous sommes à mille lieues de la ligne claire d'un Hergé. Les personnages et les décors étant bien détaillés et à l'opposé des gros nez puisqu'ils sont réalistes.

 

Le premier album s'étant terminé sur des mystères non résolus, j'ai dû le relire afin de tout me remettre en mémoire avant de commencer le suivant. J'avoue avoir mieux aimé le style du second dessinateur par rapport à celui  du premier tome.

 

Jack l'Éventreur a encore frappé : on vient de retrouver des morceaux d'une femme sur les rives de la Tamise et un tronc dans ses eaux boueuses. Ils ne le savent pas encore, mais ceci n'est pas l’œuvre de Jack mais celle du Tueur au Torse qui sévit en même temps que le grand Jack.

 

Le suspense et le mystère sont bien dosés, les pistes sont nombreuses et l'assassinat de Mary Jane Kelly viendra clore cette épopée sanglante. Enfin, pas tout à fait...

 

— En trente ans de pratique, je n'avais jamais vu une telle mutilation faite sur un corps. Le tueur lui a tranché les oreilles et le nez, puis dépecé le visage jusqu'au crâne. Ses seins ont été découpés, ses organes internes retirés et disposés sur la table de chevet et près du lit... Ses parties génitales mutilées. La mort a probablement été causée par cette entaille à la carotide droite.

 

Les personnages de fiction tel Van Helsing côtoient sans problèmes les personnages ayant existé tels l'inspecteur Abberline, le Dr Bond (on parle de lui mais on ne le verra pas), la Division H et l'acteur Mansfield qui jouait le rôle dans la pièce du Lycéun Théâtre "Dr Jekyll et Mr Hyde".

 

Van Helsing est bien travaillé, il est en proie à des cauchemars récurrents dû à son combat contre Dracula et ses sbires et la prise de morphine ne résoudra pas ses soucis, loin de là.

 

Bonsoir, maîtresse de la nuit. Ce soir nous avons rendez-vous... Diffuse dans mes veines ta douce caresse... et transporte-moi dans le monde d'Hypnos.

 

À noter le clin d’œil amusant de sa boite à morphine, cachée dans sa bibliothèque, derrière un ouvrage de Nietzsche (Also sprach Zarathustra) et d'Arthur Conan Doyle.

 

J'ai adoré le final qui ne se contente pas d'être réglé en deux cases mais s'étale sur plusieurs pages.

 

Le diable se cachait dans les détails...

 

Une vraie réussite que cette suite, tant au niveau des dessins, que du scénario, des décors, des ambiances, des tons chauds des couleurs, du suspense et du mystère entretenu pour nous dérouter.

 

Challenge "Thrillers et polars" de Sharon (2015-2016),  Challenge "Polar Historique" de Sharon, Challenge "Victorien" chez Arieste, Challenge "XIXème siècle" chez Netherfield Park et "A year in England" chez Titine.

 


 

Titre : Scotland Yard,Tome 1 : Au cœur des ténèbres


Scénariste : Dobbs
Dessinateur : Perger Stéphane
Edition : Soleil Productions, Collection 1800 (07/2012)


Résumé :

Londres, 1890. L’inspecteur Tobias Gregson est une des valeurs montantes du Yard. Mais sa carrière serait accélérée s’il n’était pas considéré comme un humaniste trop sensible et avant-gardiste, et surtout s’il n’avait pas pour fonction principale d’être le défouloir quotidien de son supérieur Lestrade.

Alors lorsqu’un transfert de prisonniers ne se passe pas comme prévu, Gregson se retrouve au placard.

Un blâme qui va vite se transformer en opportunité afin de démontrer sa vraie valeur aux yeux du patron des patrons, le commissionner Fix.

À la tête d’une équipe atypique réunissant un gamin des rues, ancien informateur de Sherlock Holmes, un médecin psychiatre aux méthodes atypiques ainsi que son étrange assistante, Gregson va faire alliance avec le diable : coopérer avec la pègre londonienne pour traquer deux fous extrêmement dangereux qui ont profité du fiasco de l’opération de transfert pour se volatiliser.

Deux aliénés mentaux qui vont apprendre aux citoyens de Londres la signification du mot terreur. À leurs côtés, plongez à votre tour au coeur des ténèbres…

 

Critique :

Londres, décembre 1889... Décidément, je suis abonnée au Londres de l'époque de Jack l'Eventreur, moi. Et, une fois de plus, me voici plongée dans des crimes sordides.

 

Oui, j'aime ça...

 

Ici, point d'élément fantastique, point de Van Helsing, chasseurs de vampires ou de toute autre créature de la nuit aux dents longues et pointues.

 

Non, pas de ça, même si le criminel est digne d'un Dracula point de vue des sentiments... C'est vous dire son empathie envers ses victimes. Un sadique de la pire espèce.

 

Par contre, point de vue références littéraires de l’époque, ça foisonne ! En ce qui concerne la plupart, je les ai tous croisé dans le canon holmésien.

 

Que du beau linge : l'inspecteur Lestrade (en version moins sympa que dans les aventures de Sherlock Holmes originales), l'inspecteur Gregson (défouloir de Lestrade, ici, sinon, il apparaît dans quelques récits de Sherlock Holmes), Bradstreet, le colonel Moran, âme damnée du professeur Moriarty (cité mais pas croisé), Wiggins, ancien des "Baker Street Irregulars", employé par Sherlock Holmes (cité lui aussi, mais non présent).

 

Pour le reste de la littérature, citons le docteur Seward qui est présent dans Dracula de Bram Stoker, présent aussi dans la bédé, aux côtés du commissioner Fix, discutant d'un certain Phileas Fogg.

 

Dernière référence, l’assistante du docteur Seward, Faustine Clerval, était présente dans Mister Hyde contre Frankenstein.

Que des têtes connues !

 

Mais que font-ils, tous ces gens connus, dans cette bédé ?

 

Et bien, vu que deux criminels jugés extrêmement intelligents et tout aussi extrêmement dangereux ont joués les filles de l'air, une partie de ces personnages vont s'atteler à les retrouver en menant une enquête et quelques investigations avec l'aide de la pègre londonienne.

 

Mariage contre-nature ? Oui, mais la pègre préfère coopérer avec la maison poulaga, dans son intérêt. Enfin, la coopération ne se fera qu'avec Gregson.

 

Vous pourriez penser que l'intrigue n’est donc pas d’une folle originalité puisque consacrée à une évasion et à des meurtres. Croyez-moi, il n'en est rien.

 

La narration devient rapidement captivante, surtout vu la manière dont le livre commence : deux filles poursuivies dans Hyde Park, munies d'un collier fort étrange... et d'un type qui vous ficherait les chocottes si vous le croisiez !

 

Le scénariste se base aussi sur des luttes internes au Yard, sur Lestrade qui déteste Gregson et qui a Wiggins en horreur, sur la traque des deux prédateurs avec l'aide d'un médecin psychiatre, sur cette alliance contre-nature avec la pègre, sur cette foule de personnages qui restent tout à fait crédibles et séduisants.

 

Un récit qui se dévore.

 

Et le graphisme de Stéphane Perger ?

 

Une sacrée surprise ! M'attendant à des dessins "habituels", dirais-je, quelle ne fut pas ma stupéfaction en découvrant des dessins aux  lavis et en aquarelle...

 

Spécial, mais au bout de deux pages, j'étais dedans. Ce genre de dessins donnent des ambiances différentes de celles auxquelles je suis habituée.

 

Cela donne de la lumière sur certaines scènes tandis que d'autres sont plus sombres. Certaines scènes sont même dénuées de décor, ne gardant que le personnage et un fond "uni". Cela renforce les expressions des personnages, le lecteur n'étant pas distrait par les décors.

 

Le seul bémol ? Ben, c'est pour quand, le second ? Oui, j'ai grand envie de lire la suite, même si l'auteur n'a pas terminé l'album par un cliffhanger comme j'aurais pensé qu'il le ferait.

 

Pas un sadique, l'homme. Merci à lui.

 

Lu dans le cadre des Challenges "Thrillers et polars" de Liliba,  "Polar Historique" de Samlor,  "I Love London" de Maggie et Titine, "Le mois anglais" chez Titine et le challenge "Victorien" chez Arieste.

 

 

 

Titre : Scotland Yard - Tome 2 - Poupées de sang

Scénariste : Dobbs
Dessinateur : Perger
Édition : Soleil (2013) 

Résumé :

À Londres, les jeunes femmes respirent de nouveau. Elles peuvent enfin sortir sans craindre de rencontrer celui que l'on nommait Carfax : ce tueur fou n'est en effet plus une menace, car il vient d'être mis hors d'état de nuire par les actions conjuguées de Scotland Yard et de la pègre.

 

Malgré ce succès l'inspecteur Gregson et son équipe savent qu'ils doivent mettre la main sur l'autre monstre qui s'est échappé de la prison de New Gate, et qui se cache toujours dans l'ombre.

 

Sa traque finale débute alors que l'alliance entre policiers et malfrats montre ses limites.

 

Renfield, un nouveau cas clinique extrême pour le docteur Seward. Un terrifiant buveur de sang ayant régressé de façon quasi-animale après une enfance traumatisée. Un aliéné qui faisait trembler jusqu'à la plus grosse crapule de la prison. Un chasseur solitaire en quête de la seule chose qui puisse lui rappeler sa part d'humanité : les poupées d'une enfance brisée.

 

Critique :

♫ Je suis une poupée de cire, ♪ une poupée de sang... ♫ Mon âme est gravée dans mes poupées, ♫ Le sang, j'vais l'faire couler ♪

 

(Moi aussi je peux massacrer France Gall et ça ne me rapporte pas un balle !).

 

Avant de me replonger dans ce second tome, j'ai repassé en revue le premier et je me suis rendue compte que Mary Pearcey, la sage-femme que l'on pendait, avait été réellement suspectée d'être Jack l'Éventreur (merci "Science & Vie Hors Série" n°263 pour la confirmation). La relecture, ça a du bon.

 

Dans le tome 1, nous avions eu la mise hors circuit du malade mental Carfax, mais il reste toujours son acolyte dans la nature : Renfield ! Un sacré sadique malade mental, lui. Oui, il se nomme Renfield, comme le malade mental dans "Dracula" et je viens de recroiser Bram Stoker !

 

Alors ce tome 2 ?

 

1854... D'entrée de jeu, on commence par apercevoir un pan de l'enfance du petit Renfield, chez ses deux tantes perverses qui le logeaient dans un placard, le frappaient, l'affamaient,... Son seul divertissement était de jouer avec ses poupées, abîmées elles aussi par ses tantines sadiques. Et puis un jour, il a mis fin au supplice... Couic les tantines !

 

Renfield, c'est un terrifiant buveur de sang qui a régressé de façon quasi-animale après cette enfance brisée. Cet homme faisait trembler les plus grosse crapule de la prison. C'est vous dire que le méchant est à la hauteur.

 

Le but de ce chasseur solitaire ? Une quête... La seule chose qui puisse lui rappeler sa part d'humanité : les poupées d'une enfance brisée.

 

La mission de l'inspecteur Gregson, du docteur Seward et de Faustine Clerval est de l'arrêter à n'importe quel prix... Non, pas de spoiler sur la fin !

 

Les dessins sont toujours en aquarelles délavées, les cases sont toujours disposées de manière non linéaire, avec quelque fois, comme pour le tome 1, une grande illustration dans le fond et des cases dispersées au milieu de la page, pour mon plus grand plaisir.

 

Mais il y a un bémol : l'histoire aurait peut-être dû être contée en trois tomes (et non 2) à cause de tout les éléments qu'elle contient, de tous les personnages que l'on croise, qu'ils soient réels ou littéraires, et, ma foi, cette profusion de détails auraient bien mérité un plus long développement.

 

Autre petit soucis : nous sommes en 1889... et les personnages parlent de Sherlock Holmes au passé, comme s'il avait déjà disparu. Heu, 1889 ? Avec deux ans d'avance sur le canon ?? Bizarre.

 

Par contre, les personnages sont toujours bien campés, Gregson a mis les poings sur les "i" avec Lestrade (oui, les "poings" et pas les "points") et ça lui a fait du bien de s'affranchir de sa mauvaise influence.

 

Wiggins a l'air de se soustraire à la pègre londonienne (bon, en 1889, il aurait dû être un Irréguliers de Holmes et pas de Moran - ce dont il ne fut jamais dans le canon) et Faustine Clerval, notre "ange" a plus d'un tour dans son sac, ou dans la valise.

 

Les allusions au calvaire qu'a subit Renfield sont coloriées en gris et sont peu nombreuse, à nous de nous imaginer ce que ces deux bigotes tyrannique auraient pu lui faire d'autre comme mal.

 

Le rythme est soutenu, le final nous donne le point de départ d'un futur célèbre roman mais, comme je l'ai dit, un tome de plus n'aurait pas fait de tort, il y avait matière à exploiter bien plus sur les personnages secondaires nommés mais dont on ne sait rien de plus; sur l'enfance de Renfield et sa vie à la prison de Newgate; sur sa rencontre avec Carfax; sur leurs matériel sadique; sur leur modus operandi;...

 

Bref, il y a tout un potentiel non exploité qui frustre le lecteur curieux. Si vous mettez votre curiosité de côté, no problem ! Les deux bandes dessinées se lisent avec plaisir.

 

Challenge "Thrillers et polars" de Liliba (2013-2014), Challenge "I Love London" de Maggie et Titine et le Challenge "Victorien" chez Arieste.

 

 


 

Titre : 7 détectives


Scénariste : Herik Hanna
Dessinateur : Eric Canete


Édition : Delcourt (2012)


Résumé :

Juillet 1920. Depuis quelques semaines, une série de meurtres frappe la ville de Londres. Trois meurtres ont eu lieu pour le moment, sans lien apparent, hormis une lettre, laissée à chaque fois, un simple chiffre 7 inscrit sur celle-ci et une liste, comme un appel, comme un défi, celui des 7 plus grands détectives connus à travers le monde…

 

En ce jour de juillet, ces 7 détectives sont finalement réunis, dans la demeure d’un d’entre eux, afin d’en découdre avec celui qui a mis à défaut la police locale durant ces dernières semaines et qui a osé les défier sur leur propre terrain de jeu : le crime…

 

Sept détectives à Londres, dans le salon de l'un d'entre eux, Ernest Patisson, détective Suisse installé là depuis peu.

 

Autour de lui, Adélaïde Crumble, institutrice retraitée ; Frédérick Abstraight, ex-inspecteur du Yard, qui a traqué en vain « l'égorgeur de Greenhill » ; Martin Bec, de la PJ française ; Richard Monroe, détective privé de Los Angeles ; le docteur Eaton « aide de camp » du plus grand détective du monde, Nathan Else, qui est bien évidemment présent à cette réunion hors du commun.

 

Aucun des ces fins limiers ne se doute de la raison de leur convocation chez Patisson, qui l'ignore lui-même...

 

L'inspecteur MacGill, une fois les présentations faites, les met vite au parfum : un tueur en série a laissé auprès de trois scènes de crimes la liste de leur nom à tous, accompagnée d'un chiffre 7...

 

C'est clairement un défi lancé aux détectives par un assassin pour l'instant insaisissable....

 

Malgré le scepticisme général face aux menaces du criminel, ces derniers acceptent de relever le macabre défi.

 

Critique :

"7 détectives", ou comment se prendre un bon coup de poing dans le plexus ! Je viens de finir de le lire et je suis encore sous le choc.

 

Pourtant, en ouvrant par curiosité cette bédé dans un magasin, j'avais passé mon tour, les dessins ne m'aguichant pas. C'est une connaissance qui l'avait lue qui me l'a vivement conseillé. J'ai écouté et j'ai bien fait.

 

Une seconde lecture ne serait pas pour me déplaire, afin de repérer ce que j'aurais pu manquer... Même si je ne suis pas séduite par les dessins, je le fus par le scénario bien fichu.

 

L'histoire se passe en juillet 1920. Depuis quelques semaines, une série de meurtres ont frappé la ville de Londres.

 

Trois meurtres ont eu lieu pour le moment, sans lien apparent, hormis une lettre, laissée à chaque fois, un simple chiffre 7 inscrit sur celle-ci et une liste, comme un appel, comme un défi, celui des 7 plus grands détectives connus à travers le monde…

 

Ces 7 détectives sont finalement réunis, dans la demeure d’un d’entre eux, afin d’en découdre avec celui qui a mis à défaut la police locale durant ces dernières semaines et qui a osé les défier sur leur propre terrain de jeu : le crime…

 

Première question que je me suis posée : qui est ce mystérieux narrateur qui nous signale que ces pages ne sont pas destinées à être lues ? On se doute que c'est l'un des témoins de cette enquête, il le dit lui-même plus bas. Mais la question sera, jusqu'à la fin : QUI ? (il nous sera dévoilé).

 

Bon sang, d'entrée de jeu je suis déjà en train de faire tourner les rouages poussifs de mes méninges en découvrant cette première page de la bédé couverte d'une écriture manuscrite.

 

Ensuite, nous passons aux dessins et par une présentation de nos sept protagonistes.

 

Tour à tour, chaque enquêteur se présente au capitaine MacGill, qui les a réunis, à ses confrères et à nous aussi également.

 

A la différence d'autres bédé, la présentation des personnages se fait sur des grandes planches, une page étant consacrée à chacun d’entre eux.

 

Les sept premières pages sont donc consacrées à nos détectives.

 

Dialogues croustillants, plongée dans l’ambiance, découverte du caractère de chacun et on imagine bien que l’affaire ne va pas être une partie de plaisir, sauf pour nous, le lecteur.

 

Sept personnages : trois Britanniques, une presque Ecossaise, un Américain, un Suisse et un Français.

 

Sept personnages face à un meurtrier… Du 7 contre 1.

 

A savoir que certains sont la copie de personnages de romans policiers : le docteur John Watson (nommé ici John Eaton) et Sherlock Holmes (nommé ici Nathan Else).

 

Le cadre est posé,  les personnages se sont présentés et les crimes nous sont expliqués. Et les questions se multiplient.

 

Qui a commis ces crimes ? Pourquoi ? Pour quelle raison réunir ces 7 experts du crimes ? Pourquoi 7 ? Qui est ce fichu narrateur ?

 

Voilà un petit aperçu de toutes les réflexions qui m'ont submergées au fil des pages.

 

Je nageais dans le brouillard, comme les personnages eux-mêmes.

 

Au fil de ma lecture, les morts s'empilant comme des paquets aux pieds d'une femme un jour de soldes, j'entrevis une hypothèse qui se révéla payante.

 

Sans vouloir jeter le discrédit sur tous les auteurs de romans policiers, on peut dire que TOUS les scénarios possibles et inimaginables ont été écrits en ce qui concerne les coupables (surtout si on a lu Agatha Christie) : du majordome à la bonne, en passant par le jardinier, sans compter celui qui avait un alibi en béton armé, le narrateur, le détective lui-même, le flic, le mort qui se faisait passer pour mort, la victime qui s'est tuée sans le faire exprès, celui qui s'est suicidé faisant accuser un autre, celui qui n'avait aucun mobile,...

 

Bref, là-dessus, on ne pouvait pas vraiment me surprendre. Mais c'est grâce à Agatha Christie et ses coupables "que je n'ai jamais vu venir" que j'ai compris où se trouvait celui de l'album...

 

"Victoire ! me suis-je écriée. Euréka ! Sabrons le champagne. Ah, tiens, il reste quelques pages à la fin"...

 

Remisons le champagne, le scénariste avait plus d'un tour dans son sac et c'est le final qui m'a collé ce formidable coup de poing dans le plexus.

 

Même si, a contrario et à tête reposée, cela fait du criminel un homme encore plus intelligent que le véritable Holmes ou que son clone, dans le livre.

 

Un coupable encore plus retors que... heu...que le plus grand des retors.

 

Je dirais même plus : diaboliquement retors, méphistophélique.

 

Pire : méphistophélèstique (cherchez pas dans le dico, je dois encore proposer ce néologisme à Larousse).

 

En quelques mots : "le scénariste m'a scier" (faute d'orthographe intentionnelle à "scier", pour ne pas dire qu'il m'a "tuer", même s'il ne s'appelait pas Omar... seuls les cancres du fond n'auront pas compris).

 

Je viens donc de lire une formidable enquête, un véritable jeu proposé par le meurtrier, dans lequel les 7 détectives se plongent à cœur joie dans l'enquête, tentant de résoudre cette série de crime tout en picolant, tout en chassant le dragon (fumer de l'opium) ou discutant avec  la fée verte (abshinthe). Oui, ils ont leurs petits travers !

 

En tout cas, le défi méritait d'être relevé et il est fait de manière brillante…Aussi bien par les détectives que par le scénariste, aussi retors que son criminel.

 

L’intrigue est prenante et bien ficelée, nous poussant à jouer avec nos détectives.

 

Tenter de repérer des indices qui pourraient trainer sur chaque page, sur chaque case, lancer des hypothèses, validées ou non par la suite de l'aventure, sans compter qu'il y a toujours une dose de surprise et d’imprévu.

 

Pour l’amatrice d'enquêtes policières que je suis, c’est jouissif. Le pied intégral.

 

Je suis sûre que les amateurs d'enquêtes apprécieront celle-ci. Il n'y a pas à dire, le scénariste a dû se lever de bonne heure pour nous pondre un scénario d'une telle densité. 

 

Tout est pensé, rien n'est laissé au hasard, tout se tient, bref, un régal !

 

Ici, le chiffre 7 n'est pas être un simple accessoire, une contrainte créée par le concept de cette série (14 albums de la série "7").

 

Le 7 a toute son importance et vous remarquerez (ou un détective vous le fera remarquer) toutes les possibilités infinies du chiffre 7 dans cette bédé. Moi-même j'en avais loupé assez bien.

 

Le 7, c'est une véritable raison d’être dans le scénario, une sacré contrainte aussi pour le meurtrier (et le scénariste !) et une autre encore plus difficile à mettre en oeuvre pour la fin.

 

C'est une des raisons qui me font dire, à tête reposée, que le criminel aurait eu du mal à tout mettre en oeuvre. Mais vu que j'ai dit qu'il était plus que retors, diabolique, même... Oui, on peut lui laisser le bénéfice du fait qu'il était tout à fait capable de mettre tout en oeuvre.

 

Dans les nombreuses qualités de cet album, je mettrai en avant sa précision, avec le fait, notamment, que tout soit expliqué et tout est justifié sans qu'il y ait la moindre incohérence. Du grand art, sans aucun doute. Diabolique, je vous le disais.

 

Autre détail qui a son importance pour ce genre de récit : la qualité de l’écriture, l’ambiance so british,  les nombreuses surprises, la densité du récit, le fait que tout ait un lien, que tout se tienne,…

 

Chaque personnage est traité avec une minutie chirurgicale, les dialogues sont de grande qualité et mention spéciale à ces quelques pages de texte pur, sans la moindre case illustrée, où le narrateur expose les réflexions du groupe, l’avancée de l’enquête, comme si nous nous trouvions nous-même en possession de son carnet secret.

 

L'album fait 64 pages, et non, il n'est pas lourd.  La lecture mettra plus de temps qu'un album classique, mais vu la qualité du récit, le clore au bout de 46 pages aurait été une hérésie, un crime.

 

Un grand moment de lecture, une sacrée claque, un véritable coup de pied dans mon postérieur, et une mâchoire qui est descendue de trois étages dans les "deux fois sept" dernières pages...

 

A l'avenir, avant de grimacer et de médire devant les dessins d'une bédé, je tournerai sept fois ma langue dans ma bouche...

 

 

 

 

Titre : Green Manor - Intégrale tomes 1 à 3 : 16 Charmantes historiettes criminelles


Scénariste : Fabien Vehlmann
Dessinateur : Denis Bodart 


Édition : Dupuis (2010)

Résumé :

Lord paralysé qui cherche à se venger de l'amant de sa femme ; petit bonhomme insignifiant persuadé l'être l'Ange de la Mort ; médecin passionné rêvant d'examiner le cerveau du grand poète et peintre William Blake : les gentlemen croisés au très select Green Manor Club sont pour le moins inquiétants.

 

Car derrière la splendide façade victorienne se cachent en fait les passions les plus violentes et les pulsions les plus meurtrières.

Retrouvez, dans ce superbe album, l'intégralité des seize historiettes policières, qui sont autant de petits bijoux de mécanisme de précision perverse, signées Fabien Vehlmann et Denis Bodart.

 

Critique

Élever le meurtre au rang de l'élégance, en faire une œuvre-d'art... Tout un programme !

 

Il s'en passe des choses pas très catholique derrière les grosses portes en bois de ce club anglais sélect qu'est le Green Manor. On y disserte sur l'art du meurtre.

 

— Choisissons soigneusement quels devront être le mobile, la victime, l'arme, ainsi que l'heure et le lieu du crime, pour que notre chef-d’œuvre soit une parfaite réussite.

 

Des gentlemans ? Que nenni ! Une belle brochette de meurtriers, d'escrocs et de bandits que la reine Victoria ait jamais connus.

 

C'est dans le magazine hebdomadaire Spirou que j'avais découvert l'univers délicieusement morbide de Green Manor.

 

Par morbide, je sous-entends un univers composé de gentleman, de gens de la haute, des membres d'un Club dans lequel on n'entre pas comme dans un moulin...

 

Et ces gens très dignes, ces gentlemans du club parlent de crimes parfaits, de crimes sans victime, de crimes insolubles, ou de ceux dont le coupable fut attrapé... tout cela en fumant un cigare hors-de-prix ou en dégustant un alcool vieilli en fut de chêne.

 

Ce recueil, en plus d'être So British, est teinté d'humour noir ou l'arroseur peut finir lui aussi arrosé... de plombs !

 

Si les dessins ne sont pas fait dans un style "réaliste", ils n'en dégagent pas moins une atmosphère d'un Londres victorien et de messieurs tout ce qu'il y a de plus dignes, de plus gentleman.

 

De plus, l'album est magnifique et à tout d'un vieux grimoire ancien. Dans la biblio, c'est du plus bel effet.

 

Les histoires sont courtes, mystérieuses, bien trouvées, sadiques, perverses et qui ont la précision d'une véritable horloge suisse.

 

C'est noir, amusant, machiavélique. C'est anglais ? Non, réalisé par un duo franco-belge, uns fois !

 

J'en ai frissonné de plaisir !

 

Challenge "Thrillers et polars" de Sharon (2015-2016), le Challenge "Polar Historique" de Sharon, le Challenge "Victorien" chez Camille, le Challenge "XIXème siècle" chez Netherfield Park, "A year in England" chez Titine, Le Mois du Polar chez Sharon (Février 2016) et Le "RAT a Week, Winter Édition" chez Chroniques Littéraires (136 pages - 616 pages déjà lues pour le Challenge).


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